top of page
  • Photo du rédacteurValère

Ittoqqortoormiit


Du fait de la météo, de la quantité de blocs de glace, et des mystères de la logistique, on ne sait jamais précisément comment va se passer le départ de notre site d'étude : en bateau ou en hélicoptère ? quel jour ? à quelle heure ? Cette année, le programme initial prévoyait un retour au village le 8 août, et c'est pour ça que j'en avais profité pour passer une dernière nuit dans la colonie. Mais la quantité de glace dans la baie sud, ainsi que le dernier échange téléphonique avec Mette, penchaient plutôt pour un départ décalé d'un ou plusieurs jours...


« Mardi 8 août. Je me recouche à 9h45, pour une petite sieste de 3h… brusquement interrompue par un réveil en fanfare à 12h50 : les bateaux sont là ! (sans que Mette nous ait prévenus…) On range nos affaires, la vaisselle, tous les trucs qui traînaient encore ici ou là (le vidage des toilettes, le brûlage de la dernière poubelle, …), le tout en quatrième vitesse pour qu'Inuuta et Hjelmer n’attendent pas trop. Bouclage en 1h30, pas mal je trouve. Embarquement dans les deux bateaux, Julie et Greg avec Hjelmer (dont le moteur rechigne à démarrer), moi avec Inuuta. Les gants sur le petit volant, la clope au bec, c’est parti ! Sur les chapeaux de roue : bateau cabré et slalom entre les glaçons encore assez nombreux sur la première portion. Bref, un départ de la cabane assez soudain et brutal, et en même temps excitant avec ce trajet en bateau de toute beauté entre glaçons et côtes rocheuses.
Plus loin, un très beau gros iceberg, quelques mouettes tridactyles, un labbe, et deux groupes de sternes arctiques au passage du cap Tobin. Un peu avant, les deux bateaux s’étaient brusquement arrêtés, pour une tentative de chasse au phoque. "Lucky seal !" me dira Inuuta.
Au port, c’est l’affluence : le cargo rouge de la Royal Artic Line, un bateau de croisière Hurtigruten (190 touristes à bord) et un deux-mâts. On débarque nos affaires, Mette arrive sur son quad. »


Bienvenue à Ittoqqortoormiit !


Si la côte est du Groenland a connu les différentes vagues de peuplement en provenance du grand nord canadien depuis 4500 ans, la création du village lui-même est beaucoup plus récente. C'est en effet en 1925 qu'une colonie de peuplement y est installée par les danois, avec des familles inuites en provenance d'Ammassalik, 1000 km plus au sud, permettant ainsi au Danemark d'asseoir sa souveraineté sur l'ensemble du Groenland.

Le village compte aujourd'hui 350 habitants. Administrativement, il fait partie d'une municipalité géante, d'une surface proche de celle de la France métropolitaine, qui regroupe les 2.800 habitants de la région d'Ammassalik au sud-est, ainsi que les 20.000 habitants de la capitale Nuuk, sur la côte sud-ouest.


Des maisons de bois colorées, au charme scandinave. Un ponton, un hôpital, une école, un supermarché. Dont les rayons sont de nouveau achalandés. Ici le cargo ne passe que deux fois dans l'été, c'est l'évènement !


Autour des maisons : un container, des véhicules (quelques rares voitures, des motoneiges et traîneaux en bois attendant l'hiver, des bateaux attendant les sorties familiales du dimanche dans le fjord voisin, mais surtout les incontournables quads avec leur caisse en bois fixée sur le guidon), un trampoline, souvent, d'autres jouets d'enfants, etc.


Aux premières loges du changement climatique, le village est en pleine mutation. Sa population décroît (il y avait 550 habitants au début des années 1990) et les activités traditionnelles de chasse déclinent du fait de la fragilisation de la banquise et des réductions de chutes de neige, qui limitent les déplacements en traîneaux l'hiver (chasse aux phoques et aux bœufs musqués). A l'inverse, la pêche (flétan du Groenland) et le tourisme se développent. En cet été 2023, ce ne sont pas moins d'une soixantaine de bateaux de croisière, du simple voilier à l'énorme paquebot, qui ont mouillé face au village !



Nous passons une petite semaine dans le confort de la guesthouse. Douche (fort appréciée), lessive, et même wifi cette année ! Du repos, après ce mois intense sur le terrain, la saisie des données, la préparation de la journée de manipe complémentaire sur une colonie de mouettes tridactyles, et les incertitudes et tergiversations (habituelles) sur le voyage retour. Le tout entrecoupé d'explorations de ce petit village tranquille du bout du monde. Pour moi, une transition bienvenue avant le retour en France au beau milieu du mois d'août.


« Dimanche 13 août. Arrivée d’un catamaran, qui passe à côté du gros iceberg tabulaire. Déambulation dans les rues du village. De la musique s’échappe d’une maison à côté de Nanu Travel. "Come, come !" un couple tout souriant m’accueille devant sa maison, peu de mots mais un vrai échange chouette, où je tente de leur expliquer que j’étais à Ukaleqarteq pour observer les oiseaux, on comprend des bribes, la femme veut que je continue à parler français, ça la fait bien rigoler. Au moment de se saluer, l'homme m'apprend le mot groenlandais pour mergule, dont la prononciation s'approche de "apeuléassou" (Appaliarsuk). »



[prochain épisode 10/10] Quelques dernières images...

34 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page